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Le sort des enfants morts sans baptême
Article mis en ligne le 21 janvier 2018
dernière modification le 1er mai 2018

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Le sort des enfants morts sans baptême

Question posée :
Certains pensent qu’un enfant qui décède alors qu’il n’a jamais été baptisé va aux limbes (c’est-à-dire qu’il est en attente jusqu’à la résurrection des morts ??) Les limbes existent-elles ? Est-ce une forme de purgatoire ? Qu’en est-il des enfants avortés ?
Nous pensons que les enfants décédés très prématurément et non baptisés ou avortés ne vont pas au purgatoire mais auprès du Seigneur, pouvez-vous nous le confirmer ?

Réponse :
L’Eglise ne s’est pas prononcée définitivement – par un dogme de foi – sur cette question.
Il y a différentes sensibilités de pensée sur la question au sein de l’Eglise.

Pendant un temps, et c’est ce qui a prévalu jusque dans les années 1960, c’était la théorie des limbes qui a été la plus répandue. On la trouve dans certains catéchismes de cette époque. Elle s’appuie sur des éléments respectables, mais sans doute incomplets.
L’hypothèse des limbes, qui n’a pas de fondement biblique, cherchait à sauvegarder trois vérités profondes :
.1 Dieu ne peut pas condamner à l’enfer des enfants qui n’ont jamais commis de péché personnel : ce serait profondément injuste, et donc indigne de Dieu.
.2 D’autre part, la réalité du péché originel - le fait que depuis le péché d’Adam et Eve, la vie de la grâce a été perdue et que nos parents ne nous transmettent que la nature humaine privée de la grâce – empêche l’âme d’accéder au paradis.
.3 La grâce de Dieu, et la vie éternelle qui en découle, est un don totalement gratuit et personne ne peut le mériter par lui-même. Il faut répondre à ce don par la démarche de foi du baptême, baptême qui est de nécessité de salut.

Ces trois vérités faisaient opter pour une solution qu’on appelle les limbes. Il ne s’agit ni du ciel, ni de l’enfer, ni du purgatoire. Il s’agirait d’un état de bonheur naturel de l’âme qui ne connaitrait pas la joie de connaitre Dieu et de le voir face à face.

Cette opinion cherchait à préserver tant bien que mal les trois vérités que nous venons de citer.
Cependant elle pose de nouveaux problèmes :
 Peut-on parler d’un bonheur qui ne serait que purement naturel ? Dieu ne nous a-t-il pas créés pour le connaitre et entrer en totale communion avec Lui ? Saint Augustin ne dit-il pas : Tu nous a faits pour Toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant que nous ne t’avons pas trouvé ?
 Même ressuscitée, même réunie à son corps, une telle âme n’irait pas au paradis. Il y aurait une insatisfaction essentielle de ces âmes, même si elles retrouvaient leurs corps pour un bonheur seulement naturel.
 Autre problème : comment une mère croyante au paradis pourrait-elle être dans le bonheur sans être réunie à son enfant, mis à part dans les limbes, dans l’ignorance du paradis ?
On sent bien qu’il y a beaucoup de choses insatisfaisantes dans cette pensée.

Aujourd’hui, elle est pratiquement abandonnée par la plupart des théologiens.
La Commission Théologique Internationale – un organisme de conseil du pape sur toutes les questions théologiques, regroupant les meilleurs théologiens de l’Église – en a montré toutes les limites dans un document assez récent.

Aujourd’hui, c’est une autre opinion, qui existait aussi dès le début de l’Église, qui prend de plus en plus de poids, parce que ces questions touchent de plus en plus de monde.
Oui, tous ces enfants morts sans baptême avant d’avoir pu poser un acte de péché sont sauvés et vont au paradis : ils n’y vont pas parce qu’ils en auraient le ‘droit’ par un mérite quelconque, mais par le don gracieux de Dieu qui veut sauver tous les hommes et leur donner la pleine communion à sa vie éternelle. Ils n’ont pas à connaitre de purgatoire. Cela vaut aussi pour les enfants avortés.
Il y a des éléments nombreux pour soutenir cette pensée :
 dans l’évangile, après que les Mages soient rentrés chez eux sans repasser le voir, Hérode fait massacrer tous les enfants de moins de deux ans dans la région de Bethléem : l’Église les a déclarés saints, les saints innocents, que nous fêtons le 28 décembre.
Certains théologiens objectent qu’ils sont martyrs parce que morts par haine de Jésus, alors que ce n’est pas le cas de tous les enfants morts sans baptême. Mais on peut répondre que déjà les enfants avortés sont les victimes d’un péché grave qui s’attaque à la vie innocente, et donc à Jésus qui a dit : Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie et aussi : Tout ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait.
Mais surtout, de façon beaucoup plus large, le salut de tous les enfants morts sans baptême est d’une convenance bien plus forte avec la bonté et la puissance de Dieu.
Il y a aussi un passage d’une lettre du pape Jean-Paul II L’évangile de la Vie qui va dans ce même sens.
Dans cette deuxième opinion théologique,
 On sauve la bonté et la puissance de Dieu.
 On garde la gratuité du don surnaturel de la grâce et de la vie éternelle.
 On ne perd pas la nécessité du baptême pour être sauvé : en effet, l’Église dit qu’il y a plusieurs formes de baptême : le baptême sacramentel que tout le monde connait, le baptême du sang pour ceux qui sont morts pour la foi avant d’être baptisés (cas de certains martyrs, et des saints innocents en particulier, encore inconscients et incapables de professer la foi) et enfin le baptême de désir qui s’applique officiellement à deux cas déjà :
.a les catéchumènes adultes officiellement admis en catéchuménat par l’Église, s’ils meurent avant la célébration du baptême, sont traités comme des baptisés et enterrés à l’église : la démarche du baptême avec toutes ses étapes forme un tout continu, et Dieu ne peut pas refuser sa grâce à ceux qui ont déjà commencé à répondre à son appel, et qui n’aurait – pas de chance ! – pas pu aller jusqu’au bout de la démarche.
.b les enfants morts sans baptême dont les parents avaient le désir du baptême pour eux peuvent être enterrés à l’église tout comme s’ils avaient été baptisés. En effet, si l’Église reconnait que leurs parents peuvent répondre à leur place sur la foi, alors, comme pour les catéchumènes, la volonté des parents de les faire baptiser tient lieu de désir de la part des enfants.
Il reste donc le cas des enfants morts sans baptême pour lesquels leurs parents n’avaient pas désiré le baptême : que leur arrivent-ils ?
Aujourd’hui, on peut penser que la foi et le désir de toute l’Église qui prie pour le salut de tous les hommes est souverainement agréable à Dieu, parce que l’Église, la famille des enfants de Dieu, demande à Dieu exactement ce que Dieu veut. Et Dieu exauce son Église qui est parfaitement en phase avec Lui.
Il reste que cette question n’est pas encore tranchée du point de vue dogmatique. Il est donc libre dans l’Église de penser dans un sens ou dans l’autre. En aucun cas, cela ne doit devenir une source de jugement, d’opposition ou de tension entre les chrétiens qui auraient des avis divergents sur ce point. Saint Augustin disait : sur la vérité certaine, il faut l’unité, sur les choses encore douteuses, il faut la liberté.
Pour approfondir, vous pouvez aller consulter l’excellent étude de Dom Jean PATEAU, Père abbé de l’abbaye bénédictine de Fontgombault, qui touché de près dans sa famille par cette question, l’a étudiée d’une façon très profonde et très claire, à la portée de tout le monde, dans son livre Le salut des petits enfants morts sans baptême (Editions Artège). Il conclut en demandant très respectueusement au pape de définir le salut des enfants morts sans baptême comme un nouveau dogme, en particulier pour apporter un soulagement certain aux parents qui ont avorté leurs enfants, et reconnaitre ainsi l’infinie dignité de ces êtres humains avortés, parce qu’ils héritent du même paradis que les survivants à l’avortement que nous sommes.
Personnellement, je tiens aussi pour cette deuxième opinion. Aux parents qui ont avorté et qui s’en accusent en confession, je donne comme pénitence particulière trois choses, pour réparer l’irréparable et restaurer le lien d’amour voulu par Dieu avec leur enfant avorté :
De donner un prénom chrétien à l’enfant : c’est leur rôle propre de parent, c’est redonner à leur enfant toute sa dignité d’être humain, qui a été niée par l’avortement.
De faire un baptême de désir pour leur enfant : s’il était né, il l’aurait fait baptiser. Seuls dans une église, ils proclameront la foi de l’Église au nom de leur enfant, et ils demanderont humblement à Dieu, au nom de sa miséricorde infinie, de réparer ce qu’ils ont détruit, en accordant la vie éternelle à leur enfant.
Et enfin, - c’est le plus beau et le plus consolant - :
De demander à Dieu toutes les grâces dont ils ont besoin en s’adressant à Lui par l’intercession de leur enfant avorté accueilli auprès de Dieu. J’appelle cela la ‘douce vengeance de Dieu’. Dieu se plait à les combler et à les restaurer par l’intermédiaire même de leur propre enfant qu’ils ont tué. Cela leur permet d’expérimenter dès cette terre le lien d’amour familial qui les relie et d’envisager sereinement la rencontre définitive le jour où c’est leur enfant avorté qui leur ouvrira la porte du paradis. Notre Dieu d’Amour se sera bien vengé en tirant d’un mal atroce un bien beaucoup plus grand.

Don Pierre-Alphonse FRAMENT