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Ethique et Entreprise
Article mis en ligne le 4 mai 2013

Rencontre à l’ICAM autour du thème de l’éthique et de l’entreprise

A l’initiative des EDC (Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens), un déjeuner débat d’une excellente qualité a eu lieu, jeudi dernier, à l’ICAM, autour du thème de « l’éthique et de l’entreprise ». Une trentaine de personnes ont participé à cette rencontre dont notre Curé, le Père José. Nous reproduisons, volontiers, quelques extraits de sa réflexion :

« Il existe aujourd’hui une mode éthique en économie. Cette vague éthique, venue des Etats-Unis, a ensuite submergé l’Europe et c’est d’autant plus paradoxal qu’au niveau des faits, on a l’impression que jamais l’éthique n’a été aussi peu pratiquée. Une chose est sûre, aujourd’hui, les préoccupations éthiques sont devenues centrales dans nos sociétés occidentales. Celles-ci se manifestent par le biais d’inquiétudes écologiques, par la méfiance du tout technique, des manipulations génétiques ou encore par le souci du respect des droits de l’homme… les sociétés prennent en particulier de plus en plus conscience des effets de l’action de l’homme sur son environnement et réalisent que le progrès technique ne sera pas en capacité de résoudre l’ensemble des dégradations causées par l’action humaine. Cette réflexion autour d’une éthique de l’entreprise n’est pas nouvelle. Depuis le début des usines en Angleterre, il existe en effet une tradition de réflexion du monde des affaires sur lui-même. L’utilitariste anglais John Stuart Mill, la pensée de Weber sur le capitalisme protestant, le paternalisme social français de la seconde moitié du 19ème siècle, ou encore toute la réflexion autour de la doctrine sociale de l’Eglise sont autant de formes de réflexions sur le rôle de l’entreprise et le sens qu’elle doit donner à son action dans la société. La formalisation d’une éthique d’entreprise à la fin du 20èmesiècle se situe dans cette même veine. C’est dans les années 70 que se développent aux États-Unis, réflexions, modèles et controverses sur la responsabilité de l’entreprise. Depuis 2000, la plupart des grands groupes se sont dotés d’une démarche de type éthique. Pour autant, l’éthique d’entreprise est originale en ce sens qu’elle est fortement controversée et critiquée, et qu’elle soulève nombre d’interrogations, du scepticisme, voire de l’indignation. Comment imaginer une "éthique des affaires" ? N’y a-t-il pas incompatibilité entre recherche du profit et quête morale ?

L’éthique d’entreprise est devenue un véritable impératif pour l’entreprise contemporaine. Elle se caractérise par son pragmatisme. Ce qui explique l’engouement actuel pour l’éthique d’entreprise, est la pression sociale qui pèse sur celle-ci... Dans le contexte actuel, la société attend de l’entreprise qu’elle se refuse certaines actions (blanchiment d’argent, implantation dans certains pays… !) Les consommateurs citoyens exigent de plus en plus la présence de principes éthiques dans les politiques d’entreprises (scandale de la viande de cheval, scandale des médicaments, etc….), Notons également la puissance des associations de consommateurs qui jouent un rôle considérable dans cette exigence.

L’entreprise ne peut réussir que dans un environnement durable. L’éthique d’entreprise se développe en effet dans un contexte de prise de conscience de la vie limitée de la planète et des effets de la production sur son état de survie. Tout ceci implique une éthique de la responsabilité, de la discussion.

Éthique et profits ne sont pas forcément incompatibles et l’on peut imaginer des schémas "gagnant-gagnant" dans lesquels l’entreprise dégage des profits et développe des activités qui sont positives pour la société et l’environnement. Aujourd’hui, on n’attend plus seulement de l’entreprise qu’elle génère du profit, mais également qu’elle respecte un certain nombre de principes éthiques. Cette politique inspire confiance à ces différents partenaires….. L’éthique d’entreprise peut donc viser l’accroissement des profits de l’entreprise en instaurant une relation durable avec ses parties prenantes et en mettant en place des actions de développement durable. L’éthique de l’entreprise naît du dialogue. Cependant une voix domine : c’est celle du dirigeant, la mise en œuvre diffère suivant l’entreprise.

On a longtemps trouvé un peu naïf le discours des Églises appelant à respecter l’homme dans l’entreprise, la dignité du travailleur, ses conditions de travail, etc. On découvre, aujourd’hui, que c’est une condition de bonne gestion. Toute entreprise qui méprise ses salariés ou les traite mal le paie un jour ou l’autre en perte d’efficacité, en chute de productivité, en désintérêt, voire en fuite des travailleurs si l’on est en plein emploi. Le temps du taylorisme est terminé.

Aujourd’hui, on apprend dans n’importe quelle école de gestion ou université qu’il faut respecter les ressources humaines, animer des équipes, informer ses salariés, décentraliser les décisions, rendre autonomes et responsables les équipes de travail, dire aux travailleurs pourquoi ils font cela, quel est le but, où se situe le service véritable du client, etc. Information et participation sont aujourd’hui les règles élémentaires de bonne gestion du personnel. Voilà un cas tout à fait intéressant. Non seulement le discours des Églises en ce domaine n’était pas ringard, mais il était en avance.

La solidarité. L’économie doit respecter la justice commutative : chacun doit être payé pour son travail, sa production, etc., de manière équitable. Mais la dignité de l’homme nous demande d’aller plus loin, car il y a un dû à l’homme parce qu’il est homme. Donc, celui qui n’a pas produit, parce qu’il est malade, âgé, handicapé, sans emploi, etc., a quand même droit à quelque chose parce qu’il est un homme et que le respect de sa vie et de sa dignité l’impose.

L’éthique est souvent un outil au service des entreprises pour un objectif unique de profit. Les profits des multinationales n’ont jamais été aussi élevés. L’éthique dans l’entreprise peut conduire à des comportements schizophréniques.

Conclusion  : Pour faire simple : la finalité première de l’entreprise est le profit non le bien social. Elle se servira de l’éthique comme des autres outils dont elle dispose pour accroitre son profit. Les autres objectifs sont connexes par rapport à l’objectif ultime qu’est le profit.

Certes, l’économie est quelque chose d’important et il faut qu’elle fonctionne bien et qu’elle soit un lieu d’éthique et de solidarité. Mais la dérive éthique la plus importante me semble être l’économisme, c’est-à-dire le fait de ramener l’homme à sa seule dimension économique : l’homme n’est vu que comme consommateur et comme producteur. Beaucoup de problèmes que nous dénonçons à juste titre ne viennent pas, d’abord, du système économique, mais de l’affaiblissement du système éthique et culturel au profit de la seule économie qui a tout envahi. Il y a là une véritable inversion des moyens et des fins, et l’économie est un moyen utile, mais pas la fin de l’homme. De nombreux signes montrent cette inversion comme, par exemple, la banalisation du dimanche : c’est la vie économique qui commande désormais et rythme nos vies humaines, et non les grands événements culturels ou religieux.

Ceci n’est pas un appel à mépriser l’économie, mais à mettre l’accent sur l’essentiel. Il me semble que quand les Églises interviennent en matière économique et sociale elles ont plus de force si elles se situent sur le plan des principes, de l’éthique, que si elles abordent la technique économique qui est moins de leur ressort. Ce que nos contemporains ont besoin d’entendre, c’est un discours sur le sens de la vie, sur les raisons de vivre, plus qu’une dissertation sur les moyens de vivre.

D’ailleurs, du point de vue éthique, les grandes questions qui se posent aujourd’hui au capitalisme mondialisé sont les mêmes que celles d’hier. Que reprochons-nous, en effet, à l’économie moderne et au capitalisme d’aujourd’hui ? D’être matérialiste et de ramener l’homme à sa seule dimension économique. D’avoir le goût du médiatique, de l’artificiel et du spectaculaire. D’exalter le pouvoir et la domination, politique ou économique. Trois « péchés » du capitalisme moderne. Mais vous remarquerez que ce sont aussi les péchés de toujours : le matériel, le médiatique et le pouvoir.

Si nous voulons faire de l’éthique économique, intéressons-nous moins à l’économie, qui n’est que le support, le moyen, et plus à l’éthique, c’est-à-dire à la qualité des hommes, à la lutte contre le mal et le péché, à la recherche du bien et du juste, et pour cela commençons par mettre les choses à l’endroit en rappelant que l’homme ne vit pas seulement de pain. C’est aussi cela remettre l’économie à sa place, celle de moyen au service des hommes ».


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